OL – Wolfsburg : la preview tactique

Hegerberg

FÉMININES. Parler d’une rencontre entre l’OL et Wolfsburg, c’est un peu comme acheter le dernier tome d’une saga de romans fantasy ultra-connue : on a beau connaître par cœur tous les anciens livres, tous les personnages principaux, toutes les précédentes batailles, l’histoire est toujours bien écrite et l’intrigue principale est tellement bien ficelée qu’on replonge dedans à tous les coups. Avant le match aller de la double confrontation en quarts de finale de Ligue des Champions (ce mercredi à 20h45, en direct sur Canal+ Sport), petit décryptage entre les lignes (tactiques) afin d’essayer de deviner le dénouement final de ce chapitre.

La saison en cours

Double championne en titre en Frauen Bundesliga (championnat) et quadruple tenante du titre en DfB-Pokal (coupe), l’équipe de Wolfsburg semblait inarrêtable lors de la première moitié de championnat 2018/19 (11 victoires et 1 match nul à la fin de la douzième journée). Grâce notamment à l’impressionnant début de saison de la jeune Polonaise Ewa Pajor à la pointe de l’attaque (12 buts sur ses 6 premiers matches, dont 3 triplés !), les Louves ont pu aborder sereinement la majorité de leurs rencontres, en se permettant même de mettre quelques bonnes raclées, notamment un cinglant 6-0 face au rival munichois lors de la troisième journée.

Pour autant, un second match nul face à Essen-Schönebeck juste avant la longue trêve hivernale, puis une défaite 4-2 face au Bayern Munich lors de la journée de reprise (dans un match extrêmement intéressant, et dont nous reparlerons plus en détail dans la partie tactique) ont permis aux Bavaroises de revenir à égalité de points. Après 16 journées, Wolfsburg est toujours leader de Frauen Bundesliga, mais uniquement à la différence de buts et n’aura le droit à aucun faux pas pour conserver le titre à la fin de la saison. Sur la scène européenne, le début des phases finales s’est également déroulé sans problème, avec quatre victoires tranquilles face à l’équipe islandaise de Thór / KA en seizième de finale (1-0 ; 2-0) et – de façon un peu plus surprenante – face à l’Atlético Madrid en 8è de finale (6-0 ; 4-0).

Le système de jeu

L’équipe de Wolfsburg possède un style résolument tourné vers l’offensive, basé sur des séquences de jeu rapides et variées, principalement au sol, avec néanmoins deux tactiques prédominantes : percussions sur les ailes suivi d’un centre (souvent classique, mais très fréquemment en retrait si la centreuse finit son débordement à l’entrée de la surface adverse), et combinaisons rapides à une touche de balle dans des espaces de jeu réduits.

Niveau composition d’équipe, l’entraîneur Stephan Lerch transcrit souvent cette volonté offensive par la titularisation d’une seule attaquante de pointe pouvant marquer et faire marquer (Zsanett Jakafbi et Ewa Pajor en alternance l’année dernière, principalement Ewa Pajor cette année), et d’une ligne de milieux de terrains avec une grosse activité et capables de contribuer au jeu offensif de l’équipe (Caroline Graham Hansen, Sara Bjork Gunnarsdottir, Alexandra Popp…). L’idée est de mettre dans les meilleures dispositions la joueuse-clé du système, Pernille Harder qui, positionnée dans un rôle de trequartista, doit intervenir aussi bien à la création des actions que pour leur conclusion.

À 0:58 : Illustration d’une action classique de Wolfsburg, avec un échange de passes Maritz – Wullaert sur l’aile gauche finissant par un centre sur un centre en retrait repris victorieusement au point de penalty par Pernille Harder

À 2:25 : Exemple d’un jeu en triangle rapide Pajor-Gunnarsdottir-Harder qui permet à cette dernière de trouver une position de frappe très favorable, obligeant la gardienne adverse à repousser sur Alexandra Popp qui marque à bout portant

Suite à une intersaison peu mouvementée, le système et l’équipe-type sont restés très stables et n’ont subi que quelques modifications mineures : le départ de Tessa Wullaert à Manchester City a permis à Claudia Neto de faire des apparitions plus fréquentes au milieu de terrain, et la recrutement de l’excellente relanceuse Sara Doorsoun (défenseure centrale en provenance du SGS Essen-Schönebeck) donne une option tactique supplémentaire et la possibilité de placer Lena Gössling dans sa position préférentielle de milieu défensif si besoin.

Cependant, un système aussi porté sur l’attaque a un inconvénient majeur : celui de ne proposer aucune solution de rechange lorsque la machine s’enraye, ou que l’adversaire réussit à empêcher toutes les transmissions au milieu de terrain avec un pressing assez haut. Dans ce genre de situation, l’absence de milieu défensif pour stabiliser l’équipe se fait ressentir, et il n’est pas rare de retrouver des joueuses complètement dépassées par l’intensité mise par l’équipe adverse et incapables de réussir plus de trois passes successives.

Cette problématique a été illustré par le match de championnat d’il y a quelques semaines contre le Bayern Munich, où Wolfsburg (aligné en 4-4-1-1) sombra pendant les deux premiers tiers du match face au 3-5-2 pressing tout terrain des munichoises. Pourtant menées 3-0 à la 70e (et l’addition aurait pu être beaucoup plus salée), les Louves (passées en 3-5-2 asymétrique) n’ont toutefois eu besoin que de 10 minutes pour profiter de la fatigue physique de leurs adversaires et revenir à 3-2, et le match nul n’a été évité que grâce à un double arrêt miraculeux de Manuela Zinsberger et à un peu de réussite côté munichois (poteau sortant de Caroline Graham Hansen).

À surveiller

Les points forts

Des joueuses talentueuses (Harder, Hansen, Pajor…) qui savent créer le danger et conclure les occasions si on leur en laisse trop de marge de manœuvre.

Un système offensif varié et efficace, et surtout compliqué à défendre lorsqu’il est mis en place.

Une assez bonne efficacité sur les coups de pied arrêtés.

Les points faibles

Une équipe qui n’aime pas défendre, et qui peut déjouer complètement dès que son jeu d’attaque ne peut être mis en place.

Une défense centrale un peu lente, qui peut se faire prendre à revers sur des offensives rapides et des appels en profondeur.

Alexandra Popp, qui reste de très loin la meilleure chance pour Lyon de jouer à 11 contre 10, voire 12 contre 10 dans les grands jours, vu son comportement parfois nonchalant et sa tendance à perdre en lucidité si elle n’est pas en réussite.

Alors, à quoi pourrait ressembler le match contre l’OL ?

Les deux équipes se basant sur le contrôle de la balle pour asseoir leur jeu offensif, inutile de souligner que la bataille du milieu de terrain sera primordiale. Malgré le forfait d’Isobel Christiansen (dont il aurait été intéressant de voir l’apport dans ce match), l’OL possède néanmoins les meilleurs éléments pour mettre rapidement le pied sur le ballon et forcer Wolfsburg à défendre et à déjouer. Charge aux Lyonnaises de concrétiser cet avantage théorique au tableau d’affichage, et de gommer cette difficulté à prendre le large au score dans ce genre de confrontations.

Dans le camp opposé, quelle solution choisir pour Wolfsburg, qui devra en plus composer avec des solutions défensives limitées par les absences de sa défenseure Sara Doorsoun et sa latérale gauche Kristine Minde (des blessures qui s’ajoutent à celles de Lara Dickenmann, ancienne de l’OL) ? Essayer de donner le change au milieu pour tenter de marquer un but à l’extérieur, avec le risque de prendre une correction ? Diminuer ses options offensives pour limiter la casse en attendant le match retour ? Prendre à la gorge l’OL et espérer faire le break rapidement avant de faire le dos rond ? Quelle que soit la formation alignée par Stephan Lerch, l’équipe de Reynald Pedros reste favorite de cette rencontre et aura toutes les cartes en main pour s’éviter un retour périlleux la semaine prochaine à Wolfsburg.

Julien Perrier

(Photo UEFA)

Commenter

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>