« On l’appelait l’Olympique de Juninho »

2611_GLY_IAM

TÉMOINS. Quand on échange avec IAM, il est toujours question tôt ou tard de football. Le Libéro Lyon en profite pour faire monter la température avant cet OL-OM de dimanche (21 heures). Ne comptez pas sur Akhenaton, Kheops et Kephren pour ressasser avec précision les précédents affrontements ou pour s’enflammer pour « le Grand Lyon » septuple champion de France des années 2000. Non, les rappeurs marseillais excellent surtout dans une « mauvaise foi » assumée, et dans une certaine idée du foot. Où Juninho et Alain Caveglia ne sont malgré tout pas nés sous la même étoile que Jérémy Morel.

 

« Là où Lyon n’a pas défié Paris, Marseille l’a défié en permanence »

Quelle image avez-vous du rap lyonnais ?

Akhenaton : On connait surtout des beatmakers car il y en a toujours eu de renom à Lyon comme DJ Duke qui a gravité dans l’entourage d’Assassin. Ou Akos qui a travaillé avec nous. La seule différence entre Lyon et Marseille, c’est que Lyon n’a pas réussi à garder et à développer ses artistes dans la ville. Ils ont toujours eu besoin de s’expatrier pour pouvoir réussir. C’est dû à l’hyper centralisme français. L’émergence du rap marseillais est due à un défi lancé directement à cet hyper centralisme. Là où Lyon n’a pas défié Paris, Marseille l’a défié en permanence.

Comment différencierez-vous foncièrement Lyon et Marseille ?

Akhenaton : Lyon a un centre-ville plutôt bourgeois et huppé, ainsi que des banlieues pauvres. Marseille, c’est l’inverse avec une construction bizarre, comme une ville américaine. Les quartiers sont dans les murs de la ville alors que les banlieues autour sont plus aisées, plus pavillonnaires. C’est une vraie différence géographique. Marseille est quand même plus pauvre que Lyon, qui est nettement plus animé.

Kheops : Ah oui il n’y a pas photo ! Tu peux manger à 15 heures le dimanche un peu partout, ce serait impossible à Marseille.

Akhenaton : Il y a aussi un côté florentin à Lyon dans l’architecture, dans le Vieux Lyon notamment.

Chambrez-vous parfois des rappeurs lyonnais ?

Akhenaton : Oui, c’est surtout Akos qui nous charriait et rentrait dans le studio pour gueuler « Allez l’OL ». Je me souviens d’un match de Coupe de la ligue (8e de finale de Coupe de France 2007 en fait) où on était 25 à le regarder, et il était le seul Lyonnais présent. Lyon marque et il se lève en hurlant : « Dans votre cul les Marseillais ! »

Kheops : Il restait alors trois minutes et je crois qu’on a mis deux buts, dont le 2e de Niang de la tête pour nous qualifier (2-1). Et là on l’a rendu fou, il s’est cassé avec les larmes aux yeux…

Akhenaton : D’ailleurs à l’époque du Grand Lyon, sa bête noire était Marseille. Lyon gagnait tout mais avait toujours de grandes difficultés contre nous (en 16 rencontres face à l’OM entre les saisons 2001-2002, ndlr et 2007-2008, l’OL l’a tout de même emporté à 6 reprises, contre 5 succès de l’OM et 5 nuls). La rivalité entre les deux clubs est plutôt récente.

« Aulas cause toujours du tort, même quand vous ne servez à rien dans le ventre mou »

Cela vous est-il arrivé d’admirer ce septuple champion de France ?

Akhenaton : On a toujours été de mauvaise foi. On a nié en bloc. (sourire)

Il vous agaçait alors ?

Kephren : Oh Juninho, oui ! (rires)

Akhenaton : On l’appelait l’Olympique de Juninho !

Kheops : Celui qui a le plus causé de tort à l’OL, c’est Aulas. Il continue d’ailleurs, même quand vous ne servez à rien dans le ventre mou du championnat.

Akhenaton : Mais c’est un vrai président !

Kheops : Oui il défend son club, mais des fois il pète un peu trop haut.

Ce ne serait pas un personnage hip-hop avec ses punchlines ?

Akhenaton : Il a repris les codes. Mais les gens de son bord, c’est à dire l’UMP, ont repris les punchlines il y a bien longtemps, sous la présidence de Sarkozy. Ils ont compris toute l’utilité de la petite phrase balancée dont on allait parler pendant plusieurs semaines. Tout le monde fait ça maintenant…

Quel joueur auriez-vous voulu sous le maillot marseillais à cette époque ?

Tous les trois en chœur : Juninho !

Kheops : J’imagine ses coups francs au Vélodrome… Il aurait retrouvé un petit air de samba dans une enceinte autrement plus chaude que Gerland, ce stade ouvert aux quatre coins.

Aujourd’hui, il y a encore des joueurs que vous aimeriez piquer à l’OL ?

Akhenaton : Plusieurs joueurs me plaisent. Je trouve Lacazette super intéressant. Grenier est super fort, Gomis aussi…

« On vous le donne si vous voulez le bouc émissaire »

Vous suivez toujours à fond l’OM ?

Akhenaton : Non, on ne va pas dire que nous sommes résignés mais même avec toute la mauvaise foi qui nous anime, on est obligé de constater que Paris et Monaco, c’est le niveau au-dessus. Si on arrive à accrocher l’Europe après un bon mercato hivernal, ce sera pas mal.

Cet OL-OM, vous le voyez comment ?

Kheops : On a une équipe capable du meilleur comme du pire, à savoir de gagner comme de s’en prendre cinq sans réagir. On verra si on joue à 10 ou à 11…

Qui manque à l’appel en général ?

Kheops : Quand on a passe à l’arrière, sur une aile…

OK, on vous voit venir. C’est vraiment le bouc émissaire de tous les supporters marseillais Jérémy Morel…

Kephren : On vous le donne si vous voulez le bouc émissaire !

Kheops : Vous allez le kiffer !

Le 8-0 de 1997 : « On était pitoyables, des ramasseurs de balles »

Quels sont vos souvenirs les plus forts dans des OL-OM ?

Kheops : Celui qu’on évoquait avant en Coupe. Mais on n’a pas également gagné une finale de Coupe de la ligue contre eux ?

Akhenaton : Oh il est beau celui-là, avec Brandao qui marque (1-0 a.p. en 2012).

Kheops : Je me rappelle aussi, à l’époque de Tapie, d’un 4-0 lors d’une première journée de championnat. Mozer, qu’on ne connaissait pas encore, a mis une espèce de tête en marchant sur la défense lyonnaise. (4-1 en fait à Gerland en juillet 1989 avec un but lyonnais de Bruno Génésio)

Akhenaton : Par contre, je me souviens aussi qu’ils nous ont mis 8-1 au Vélodrome.

Kheops : Non, c’était 9-2 chez eux. (8-0 en fait en mai 1997 à Gerland lors de la dernière journée de D1)

Akhenaton : On était pitoyables, des ramasseurs de balles cette année-là…

Et le 5-5 en novembre 2009, non ?

Akhenaton : Ah ouais, on était dégoûtés, mais ce match était magnifique, un des plus beaux spectacles de la décennie. Les gars de Canal + étaient comme des fous de diffuser cette rencontre.

Gardez-vous un bon souvenir d’Hatem Ben Arfa, que l’OL avait transféré à l’OM durant l’été 2008 ?

Akhenaton : On le kiffait ! C’est un joueur de génie. Quand il rentrait, je voyais des phases de jeu plaisantes. Après, on peut discuter 150 000 ans de son comportement. Je ne suis pas tous les jours avec lui donc j’en ai rien à foutre… (Il enchaîne) Comment s’appelait cet attaquant d’origine napolitaine qui nous avait enfoncés dans le 9-2 ?

Euh, Alain Caveglia ?

Akhenaton : Caveglia ! Il nous avait fait mal celui-là…

Les nouveaux stades, ça va changer quoi à Lyon et à Marseille ?

Kephren : Pour Lyon, ça va changer beaucoup de choses. Le tiroir-caisse sera bientôt à 100 % pour l’OL. Aulas va vraiment faire le bon coup là-dessus, même si c’est difficile aujourd’hui, et que ça le sera peut-être encore pendant deux ou trois saisons. (Sur un ton sérieux) J’espère que Lyon restera en Ligue 1.

Akhenaton : On peut d’ailleurs remarquer que toutes les équipes vivent de grosses difficultés lors de la construction de leur stade. C’est indirectement lié aux finances. Pour Marseille, je te prie de croire que les gens vont la sentir passer l’ambiance dans le nouveau Vélodrome. S’ils tremblent maintenant, ils vont « sur-trembler » car ça fait déjà un bruit assourdissant, alors que les travaux ne sont pas finis !

Comment voyez-vous la saison de l’OL ?

Akhenaton : On vous souhaite de ne pas trop déprimer. Vous êtes capables du meilleur comme du pire. Vous nous ressemblez bien cette année donc ne vous inquiétez pas, on va se tenir la main !

Entretien réalisé par Jérémy Laugier

Commenter

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>