Fekir, le tenant du tilt

Olympique Lyonnais

RANK’N’OL #S03E22Le genre de match à plomber bien des certitudes et pourrir Noël. Ça s’est finalement transformé en grande kermesse. Où les génies régalent, le foot créatif l’emporte sur la défense à neuf et un ancien de la maison s’offre le jubilé le plus classe de l’année. Cet OL-Caen (3-0) avait de quoi faire flipper. Au final, les Lyonnais pourront aller jouer tranquilles leur extraball à Bordeaux. En attendant, c’est le Rank qui claque.

 

Le match : La fête à la maison

 

Olympique Lyonnais

Le mode d’emploi : Let’s Rank’n’OL !

 

Olympique Lyonnais1. Nabil Fekir

Chacun son tour. Normalement, c’est Lacazette qui use la défense adverse, l’amenant à la rupture à force de duels joués sur un mode féroce. Cette fois, c’était au tour de Nabilon. S’il n’a pas la résistance du Kid de Mermoz, il n’en tient pas moins ce qu’il faut de caisse pour assommer sur la longueur des Caennais qui finissent au radar. L’hypnose prend tellement que Fekir se permet un tour en solo de la surface normande, ignorant aussi bien les siens que ses adversaires, pour mieux trouver ce qu’il cherche, le point de penalty, le second de la soirée (74e). Et puisqu’il a décidé d’inviter les supporters lyonnais chez FIFA, Nabil régale jusqu’au bout. Quitte à y aller de sa faute de goût en voulant transformer l’affaire. A mauvaise idée, inspiration de génie, c’est Vercoutre qui détourne le tir et rappelle à Nabil le premier que son match était bien là où il aurait dû en rester sans ce dernier coup de force, dans la provocation et nulle part ailleurs. Ce qui lui a valu de ramener un penalty que Lacazette a pris soin de transformer en 14e but personnel (7e). Avant d’envoyer ce corner au second poteau pour Alex (57e) et de donner dans la remise en retrait pour Benzia (61e). Impliqué sur tous les buts et présent sur tous les points show de la seconde période, Fekir a beaucoup fait pour la démonstration lyonnaise du soir. Trop même si l’on suit Hubert Fournier : « Nabil est dans une période un peu difficile. Il confond encore vitesse et précipitation. Il faut qu’il se reprenne. » Ça sent trop le discours de vieux coach pour qu’on ne renifle pas celui qui, comme tout le monde ce soir, préfère encore voir Nabil à la manette plutôt qu’à la manita.

Olympique Lyonnais2. Alexandre Lacazette

On a d’abord cru que les Bastiais avaient trouvé le dispositif qui l’empêcherait de marquer. Un genre de défense à cinq, dont trois lascars pour lui seul, c’est bien sur ce modèle qu’on se présente face à l’OL depuis cinq matchs. Comme d’habitude, Lacazette a d’abord fait mine de plafonner, renvoyé à ses limites qu’on avait annoncées, pour mieux s’en jouer. Plutôt que de reprendre les affaires là où il les avait laissées à Annecy, il a donc rejoué la partition à l’identique, mais à l’envers : un penalty sans trembler pour commencer (7e), un tir sous la barre pour nettoyer un corner envoyé au second poteau (58e). De quoi placer Lacaz’ parmi ceux qui ont prouvé, qu’à l’envers comme à l’endroit, le génie se fout bien des contraintes. Ceux qui ne se sont jamais remis des bandes de George Martin sur Tomorrow Never Knows ou du montage de The Betrayal dans Seinfeld savent de quoi on parle. S’ils trouvent la théorie trop suspecte, les autres pourront toujours s’en remettre à ce qui reste, soit cette succession de duels avec une défense caenaise qui doit trop s’arracher pour qu’on sente combien ça pèse de jouer avec autant de détermination dans le dos. Si bien que quatre types ne suffisent plus à retenir cette accélération qui décale Jallet dont le centre finit (trop haut) pour Benzia (56e). Lacazette peut tout prendre pour lui, le poids d’une défense serrée ou la lumière à mesure que ses stats affolent un peu plus les fins de match (15 buts en 18 journées). Il veille toujours à libérer la faille qui est en face. Plus que jamais, la faille est bien l’avenir de l’OL.

Olympique Lyonnais3. Rémy Vercoutre

Tout s’est passé comme si rien n’avait changé. On était à Lyon, dans ce qui s’apparentait à une séance d’entraînement comme il en avait vécu quelque 3.000 entre 2002 et 2014. Rémy Vercoutre s’est fait allumer pendant une heure et demie. Les attaquants en ont profité pour garder la confiance (Lacazette, 7e et 58e) ou la retrouver (Benzia, 61e), les autres pour s’essayer devant le but. Mais le meilleur de la séance restera sans conteste le gardien lui-même, efficace avec Fekir (4e, 86e), Lacazette (12e), Jallet (23e) et Ferri (51e), parfait devant Ghezzal (79e) et Yattara (90e), génial face à Gonalons (33e). Puis on a eu droit au classique défi du penalty, qui vaudra à Fekir de payer les merguez pour le prochain barbecue (76e). Sereinement, comme à la maison, c’est ainsi que Rémy Vercoutre a joué sa meilleure prestation : brillant juste ce qu’il faut pour l’émulation, sans déranger l’ordre établi.

Olympique Lyonnais4. Jordan Ferri & Corentin Tolisso

Corentin-TOLISSOOn avait plutôt mis la grisaille passagère du milieu lyonnais sur le compte de trouvailles adverses sachant le faire déjouer. Au point d’oublier ce qu’il devait à Ferrisso, duo de fortune qui s’est imposé en alliance de circonstance au fil de la montée en puissance du jeu lyonnais. Pour s’en convaincre, il suffit de convoquer tout ce qu’on a moins vu cette fois à la différence des dernières apparitions lyonnaises, à commencer par ces matchs à grands rendements de Maxime Gonalons. A moins de s’en remettre à ceux qu’on a fini par mieux voir, soit cette ligne d’attaque qui efface (Fekir) autant qu’elle plante (Lacazette et Benzia). C’est bien là que se situe la subtilité du travail de Ferri et Tolisso, à se faire oublier pour mieux faire exister le jeu tout autour d’eux. S’il fait la part belle aux coups d’éclat, le Rank n’oublie pas non plus ces héros de l’underground qu’une bande de happy few n’oubliera jamais de célébrer pour une course de replacement, quelques pas en arrière ou un pressing qui suffisent à bloquer les relances adverses. À ce jeu-là, Tolisso sait y faire pour compenser ces différences qui se voient un peu trop décisives chez Ferri, quand Jordan rend à peine perceptibles les moments d’oubli de Corentin. À eux deux, les gars manient surtout une patience de rêve, pour faire s’étirer et bailler les lignes adverses. Peut-être sont-ils trop conscients de leurs moyens limités, toujours est-il qu’ils laissent le coup d’éclat aux autres. Pour, l’air de rien, mieux renvoyer à plus tard la question de savoir si Gourcuff plutôt que Grenier ou combien de jours avant Fofana. Une certaine idée de la claque moyenne.

Olympique Lyonnais5. Yassine Benzia

À 20 ans, Yassine Benzia n’est pas devenu Benzema. Ça n’a pas l’air de le perturber plus que ça. Nous non plus. Surtout quand le garçon est le troisième larron d’une attaque qui pète le feu. Et si les seconds rôles prennent parfois la lumière, Benzia a démontré contre Caen qu’il n’y avait pas de lumière sans technicien. En tout cas, qu’elle était moins belle quand ils étaient moins bons. On a souvent vu Lacazette et Fekir sauver l’OL à eux seuls ces derniers temps, mais l’ensemble manquait jusqu’ici cruellement de fluidité. Sans ballon, Benzia a réussi à être plus influent que toutes les tentatives de N’Jie ou Yattara réunies ces six dernières semaines. Et si on a retrouvé un peu de Bedimo, c’est grâce à lui. Face à une équipe qui ne pouvait pas être plus regroupée derrière, il a réussi à créer des brèches par ses seuls déplacements. Ses remises subtiles pour Fekir (4e) ou Lacazette (12e) auraient pu être autant des passes décisives, tout comme les interventions de Seube face à lui (9e, 32e) auraient dû valoir deux penaltys si le premier accordé à Fekir ne les avait précédées. Benzia l’insoumis a même réussi la performance de réveiller le 4-4-2 tout en donnant des garanties quant à sa capacité à animer le flanc gauche pour le 4-2-3-1 promis à devenir la norme à l’extérieur. Comme un gamin tout prêt à faire ce qu’on attend de lui, à la seule condition qu’on ne le lui demande pas. Mais puisque tout le monde avait le droit de canarder Vercoutre ce vendredi soir, il a fini par retrouver ses instincts. Sa déviation de la tête sur celle de Jallet était bien plus inspirée que le résultat ne l’a laissé penser – ce ballon qui file au-dessus de la barre à la 51e – et son but bien plus élégant qu’il n’y paraît (61e). Benzia pouvait sortir (64e), le sentiment du devoir accompli, sous les acclamations de Gerland. Qui n’avait pas attendu ce pion pour se dire qu’un Benz, même d’occase, ça reste une belle affaire.

Par Pierre Prugneau et Serge Rezza

Retrouvez le Rank’n’OL sur OL Dirty Bastards et le Libéro Lyon.

(Photo Jean-Marc)

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