Billong : « Je suis lyonnais et je le resterai toute ma vie »

Olympique Lyonnais

SOUS L’HORLOGE. C’est par ses mots que Romarin Billong s’est présenté à son arrivée à Saint-Étienne, après onze années passés à l’OL. À quelques jours du Derby et pour le tout premier rendez-vous Sous l’horloge, il était donc le « client » idéal. Très souvent rieur, parfois ému, Romarin Billong se confie sur ses années lyonnaises et sa carrière.

Une terrasse de café à proximité immédiate de ses anciens bureaux de la Société Générale Banque Privée en plein Paris. Un Perrier menthe pour deux bonnes heures d’entretien. Un Romarin Billong en forme athlétique et n’ayant pas pris une ride. Consultant pour l’Équipe 21, il est aujourd’hui à la tête du cabinet de gestion de patrimoine qu’il a créé. «J’ai de la chance car j’avais deux passions, le foot et la finance, et j’ai pu en faire deux métiers ! Mais déjà quand j’étais tout jeune, à l’OL, nous avions un petit club de boursicoteurs, avec Ali Bouafia, Jean- Marc Knapp et Christophe Breton. Et c’est à ce moment-là que j’ai acheté ma première action.»

  Ses dates  

  1971 : naissance au Tchad 

  1984 : arrivée au centre de formation de l’OL 

  1990 : 1ère apparition en D1 

  1995 : signature à Sant-Étienne 

  2000 : signature à Nancy 

  2002 : retraite sportive 

 

Quand Garde et Genesio piquaient les goûters

Comment as-tu découvert le football et l’OL ?

Je suis arrivé en France en 1972. J’avais moins de 2 ans. Mes parents se sont installés à Tassin-la- Demi-Lune. Un parent d’élève qui était aussi dirigeant à l’UODL (Union olympique demi-lunoise, ndlr), le club de Tassin, a insisté pour que je m’y inscrive et, pendant toute mon enfance dans ce club, c’est lui qui a fait tous les trajets. Il s’appelait M. Oulevey. J’ai malheureusement perdu contact alors qu’il a beaucoup compté pour moi.
À l’époque, on battait quasiment toutes les équipes du coin sauf une : l’OL. Je me souviens aussi d’un match qu’on avait perdu contre Champvert où jouait Bruno N’Gotty. C’est Alain Thiry (défenseur ou milieu de l’OL de 1970 à 1975 puis responsable du recrutement des jeunes) qui m’a repéré et qui a demandé à mes parents de m’inscrire à l’OL. Mais de Tassin à Gerland, c’était très long. Puis mes parents ont déménagé à Moulin à vent, bien plus près de Gerland, mais l’UODL a refusé ma mutation. J’ai donc arrêté le foot pendant une saison et j’ai recommencé à 13 ans en rejoignant les minimes de l’OL.

Comment s’est passée cette intégration au sein du centre de formation ?

Un nouvel horizon. L’OL ! Et jouer au foot était naturel, c’était ma passion. En Minimes 1, j’ai rencontré David Venditelli, aujourd’hui agent d’Éric Abidal, ou Jocelyn Fontanel, le président de MDA Chasselay. En sport-études, j’avais un an d’avance et j’étais le plus petit. Pour les tests physiques à l’entrée au lycée, j’étais rapide et endurant mais je manquais de puissance. On avait fait un atelier de frappes tendues aux 20 mètres et j’avais été incapable de tirer directement sans rebond ! Aujourd’hui, cela m’aurait disqualifié. Heureusement, j’ai grandi. C’était une chouette période, pleine de souvenirs : dans le bus qui faisait la navette entre le collège Vendôme et le lycée Faÿs pour nous emmener à l’entraînement, il n’y avait que des gamins du centre de formation. Les plus vieux étaient devant et ils nous piquaient nos goûters quand on montait. Parmi eux, il y avait Bruno Genesio et Rémi Garde ou encore Pascal Fugier, et Christophe Breton !

« Lacombe allait voir tous les matchs de la région, même les plus improbables »

À ce moment-là, savais-tu que tu allais devenir footballeur professionnel ?

Absolument pas ! Je n’ai jamais vécu dans le but de devenir pro. Mon parcours a d’ailleurs été assez bizarre et parfois frustrant. En cadets, j’étais constamment relégué en équipe 2 ou 3 en tant que capitaine alors que ceux de ma génération étaient en équipe 1. En Juniors, j’étais en équipe 1, mais ils étaient en DH ou flirtait avec la 3e division (D3, équivalent aujourd’hui de la CFA). Puis, tout à coup, je suis passé en 3ème division. À l’époque, je n’allais pas au stade, je préférais regarder les grands matchs à la télévision. Je n’avais pas d’idole, mais j’adorais trois joueurs : José Touré, Pep Guardiola et Manuel Amoros.

Qu’est ce que tu as appris en 3e Division ?

J’ai rencontré trois personnes qui ont énormément compté dans mon évolution. D’abord, José Broissart, que l’on surnommait Zé. C’est l’homme de la formation à l’OL. Il était rude, mais quand il disait à Ghislain Anselmini « un défenseur à terre est un défenseur battu », tu l’écoutais. Je jouais milieu offensif, mais même quand je suis devenu latéral, j’ai très peu taclé. Ensuite, Bernard Lacombe. Il allait voir tous les matchs de la région, même les plus improbables. Il suivait tous les jeunes. Très dur mais humain. Quand je me suis blessé, il est venu me voir à l’hôpital. Enfin, Raymond Domenech. Très important dans le dispositif car c’était lui qui décidait de faire jouer les jeunes en D1. Cette année-là (1989), on a raté la Gambardella en perdant contre Cuiseaux-Louhans chez nous. Bernard Lacombe dit encore qu’on aurait dû la gagner. Onze des treize joueurs de l’équipe ont signé des contrats professionnels !

Comment a réagi ta famille ?
Pour mon papa, l’essentiel était que chacun de ses enfants fasse des études supérieures après le bac. Seules comptaient les études. Le foot était un non-événement, un hobby. Personne ne m’a jamais poussé en me disant que c’était vital.

Aulas et le rictus de Milos Bursac

Quand as-tu été appelé en D1 ?

En avril 1990. Et directement comme titulaire, en plus ! C’était à Monaco, au marquage de José Touré, que j’admirais. Il m’a mis des petits coups pendant tout le match ! Dans mon esprit, il était pourtant un virtuose… Lors du déplacement, j’ai partagé la chambre de Claudio Garcia (attaquant argentin, à l’OL de 1988 à 1990). Je n’avais pas 20 ans et il m’a parlé sans cesse pour me mettre en confiance. J’ai gardé beaucoup de respect pour lui !

Tes débuts en D1 n’ont pas été marqués par la réussite…

Non. Je n’étais vraiment pas le porte-bonheur de l’OL, c’est le moins que l’on puisse dire.. Après la défaite à Monaco, on a perdu contre le PSG à Gerland, à cause de moi. Pas mieux la semaine suivante à Bordeaux. Trois défaites d’affilée ! Dans un milieu superstitieux, ce n’était pas le démarrage idéal. Heureusement, ça s’est arrangé ensuite.

À tes débuts en pro, il y avait quand même de sacrés caractères dans l’équipe.

J’ai eu énormément de chances avec tous les anciens expérimentés. Il y avait Eugène Kabongo (attaquant zaïrois [RDC], à l’OL de 1897 à 1990), toujours la classe avec les jeunes. Et puis il y avait le papa : Alim Ben Mabrouk (milieu, international algérien, né à Lyon mais un seule saison à l’OL, 1991-92, à la fin de sa carrière).

D’autres joueurs t’ont-ils marqué ?

Milos Bursac (attaquant serbe, à l’OL de 1990 à 1992) ! Il a été à l’origine de l’un des nos plus gros fous rires, en tout cas le plus contenu. Avant le match aller contre Öster Växjö, c’est-à-dire le premier match en Coupe d’Europe à Gerland depuis plus de quinze ans, Jean-Michel Aulas a fait un discours très solennel. Il fixait le milieu de la pièce où, par hasard, se trouvait Milos, qui avait en permanence un rictus narquois, totalement involontaire. À un moment, excédé, le président s’est arrêté et a dit : « Je te fais rire Milos ? » Et, Milos, avec son accent imparable, a répondu : « Non Président, moi pas rigoler, moi écouter. » Il était super sérieux, il a eu l’air encore plus insolent. On a dû se pincer pour ne pas rire. (Les photos de Bursac sont très explicites sur le « problème »)

Pfannkuch ? « C’était une catastrophe »

Tu as joué avec Roberto Cabanas !

Très fort… mais surtout à l’entrainement, comme Abedi Pelé : ils étaient très forts mais on avait du mal à les trouver et à leur donner de bons ballons en match. Mais c’est Roberto qui m’a donné envie de faire des abdominos ! Il en faisaient 1000 tous les jours ! Moi je me contentais de 300 mais je tiens le rythme depuis plus de 20 ans, pas tous les jours mais presque ! (Il semblerait que l’attaquant paraguayen, une saison à l’OL en 1990-91, ait lui arrêté.)

Tu peux nous parler de Thomas Pfannkuch ? (« Le nouveau Beckenbauer »…)

En dehors du terrain, c’était une catastrophe. Personne ne voulait partager sa chambre. Comme je parlais anglais, ça a été pour ma pomme. C’était horrible. Il ne faisait rien d’autre que de traîner sur son lit avec des journaux « olé-olé » en pétant et rotant allégrement. Je quittais toujours la chambre en hurlant dans l’hôtel : « Libérez moi ! »

Propos recueillis par Lucien Eynard

La 2e partie de notre entretien avec Romarin Billong, ainsi son son onze OL star : « Ça joue bien chez les Verts, mais.. »

(Photo Lucien Eynard – Le Libéro Lyon)

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