Sidy Koné : « Garande veut sauver sa tête sur mon dos »

RÉPONSE. Le jeune international malien, prêté en deuxième partie de saison par l’OL à Caen (Ligue 2), où il n’a pas joué une seule minute, revient sur les propos de l’entraîneur normand Patrice Garande, qui a publiquement mis en cause son comportement.

Sidy Koné (Mali, Olympique Lyonnais)

Sidy Koné estime que Patrice Garande l’a allumé pour justifier de ne l’avoir jamais utilisé quand le club laissait s’envoler la montée en Ligue 1. (Photo Pierre Prugneau – Le Libéro Lyon)

 

« Ce n’est pas moi qui t’ai fait venir. Si tu veux, tu retournes à Lyon »

Au mercato de janvier, tu avais l’intention de partir de Lyon ou pas ?

Oui. Lyon, c’est une grande équipe. Moi je suis jeune, je viens juste de commencer ma carrière. Quand on est jeune, on est obligé de passer par un certain chemin pour avoir du temps de jeu. Donc c’est ça qui m’a poussé à partir ailleurs avant de revenir à Lyon pour m’imposer. Alain Cavéglia (aujourd’hui directeur sportif du Stade Malherbe de Caen, ndlr) m’appelle pour que je vienne aider l’équipe à monter en Ligue 1. On m’a dit qu’il fallait que j’y aille plutôt que de jouer en réserve. Donc j’ai rappelé Cavéglia et j’ai dit : « OK, y a pas de souci. »

Tu en as parlé avec Rémi Garde ?

On en a parlé le jour de mon départ. Il m’a dit qu’il fallait que je me comporte bien, pour l’image du club, que j’allais représenter l’Olympique Lyonnais. Moi, j’ai dit OK. De toute façon, je suis quelqu’un qui n’aime pas trop parler, je respecte tout le monde. Je suis éduqué comme ça. Après, il m’a dit : « J’espère que tu reviendras pour t’imposer. »

Et ta première rencontre avec Patrice Garande, ça se passe comment ?

Je suis parti avec Alain voir le coach dans son bureau. Il m’a dit : « Sidy, on connait tes qualités depuis trois ans, j’espère que tu vas nous apporter plus. » Dès les premiers jours d’entraînement, lors d’une opposition, je vais au contact avec un joueur. Et là, le coach me dit : « Il ne faut pas blesser un joueur ici, parce que ce n’est pas moi qui t’ai fait venir. Ou si tu veux, tu retournes à Lyon ! » Le joueur n’était pas blessé. Lui-même m’a dit en rentrant au vestiaire : « Sidy, tu ne m’as pas touché. Je ne sais pas pourquoi le coach t’a parlé comme ça. » En plus, il dit ça devant tout le monde ! Après, il a su que j’étais énervé. Il m’a appelé dans son bureau pour me dire : « Peut-être que tu l’as mal pris, tu n’as pas bien entendu, peut-être que les joueurs ou les gens qui étaient autour vont transformer (les propos), etc. » Moi je réponds que ce n’est rien, que ça arrive quand on est énervé. On continue comme ça et le week-end, quand il fait son groupe, il ne me prend pas ! Je suis parti jouer avec la réserve. Ainsi que les cinq week-ends suivants.

Contre Dijon, « [Agouazi] ne peut pas courir ! »

Et tu finis par lui demander des explications ?

Début mars, je décide d’aller le voir dans son bureau et je lui dis : « Coach, je voudrais savoir par rapport à ma situation. » Il m’a répondu que « les choses [étaient] claires », qu’il avait ses joueurs en fin de contrat et qu’il voulait leur donner leur chance. Que moi, il me restait deux ans de contrat avec Lyon (jusqu’en juin 2015) et que je pourrais m’en sortir grâce à mes qualités. Et que ce n’était pas lui qui m’avait fait venir, qu’il fallait aller voir Alain Cavéglia.

Mais toi, tu es un récupérateur et tu arrives pour compenser la blessure d’un relayeur, Agouazi. On peut comprendre que tu ne joues pas. Mais même quand Seube est absent, il ne t’aligne pas ?

Il prend un autre milieu ou un défenseur central. Je ne suis même pas sur le banc. Il m’a pris deux fois seulement dans le groupe, contre Istres et contre Arles-Avignon (les 24 et 29 mars). Je pensais qu’il allait me faire rentrer, même cinq minutes ! Mais non.

Et contre Dijon, tu es dans les tribunes et tu vois Agouazi prendre le bouillon avec le genou enflé…

Il ne peut pas courir ! Lui-même, il était déjà venu me voir : « Franchement Sidy, tiens bon. Tout le monde sait que tu as la qualité. » Les joueurs venaient me voir pour me demander pourquoi je ne jouais pas, s’il y avait un problème. Moi je disais non, que ce n’est pas moi qui décide.

« S’il était monté, il aurait dit quoi ? Que je n’avais pas le niveau ? »

Mais quand Patrice Garande parle de toi au moment du bilan de fin de saison, ce n’est pas le footballeur mais l’homme qu’il met en cause.

Je me demande souvent : quand est-ce que je me suis mal comporté ? Il ne peut pas me dire dans les yeux que j’ai eu un mauvais comportement. On dirait qu’il veut sauver sa tête sur mon dos.

Pour ne pas avoir à rendre de comptes sur le fait qu’il ait raté la montée et qu’il ne s’est pas servi de sa recrue ?

C’est ça ! On va obligatoirement lui demander ce qui n’a pas marché, pourquoi Sidy Koné n’a pas joué. Pour s’en sortir, il va dire que je n’avais pas un bon comportement. Ça, ce n’est pas une excuse ! S’il était monté, il aurait dit quoi ? Que je n’avais pas le niveau ? Mais vu qu’il n’est pas monté et qu’il ne m’a pas fait jouer, il a trouvé autre chose.

C’est sa parole contre la tienne. Mais il est entraîneur, il a 52 ans, toi 21.

C’est ça le problème. Quand je suis sorti de son bureau, il m’a dit : « Arrête de demander [à voir] le coach, sinon on va te piétiner à Lyon. » Il est dans une meilleure position que moi. Mais quand il dit des choses, même si ce n’est pas la vérité, c’est facile de le croire, parce que c’est lui le coach. Je ne raconte pas quelque chose que je n’ai pas vécu. Je ne mens pas pour percer à Lyon, ni pour sauver ma tête.

« Il m’a mis 1000 euros d’amende ! »

Mais quand tu en avais marre, est-ce que tu es sorti ? Est-ce que tu as fait des trucs que Patrice Garande aurait pu mal prendre ?

Non. Après l’entraînement, j’étais toujours à la maison. Même à Lyon, j’ai l’habitude d’être à la maison. Peut-être qu’il a mal pris le fait que je sois venu le voir. Peut-être que c’est un mauvais comportement pour lui, qu’il s’est dit que j’avais la grosse tête. Mais partout, dans le monde du football, on communique avec les coachs. À Lyon, si quelque chose ne va pas, on demande à Rémi Garde. Au Real Madrid, on demande à José Mourinho. Et là, il m’a mis 1000 euros d’amende parce que je suis allé le voir pour avoir des explications !

Tu as eu des nouvelles de l’OL durant ces quatre mois ?

Stéphane Roche, le coach de la réserve, m’a appelé et m’a dit : « J’ai vu que tu as joué avec la réserve. Mais je veux que maintenant tu t’imposes en Ligue 2. » J’ai eu Florian Maurice aussi de temps en temps. Je leur ai dit la même chose. Si j’avais su, je serais resté. On ne peut pas faire de comparaison, mais la réserve de Lyon, c’est meilleur que celle de Caen. Et Rémi Garde aurait pu me prendre de temps en temps…

Et tu es dans quel état d’esprit pour ton retour à Lyon ?

Mon ambition, c’est toujours la même. J’ai envie de jouer, de faire le maximum pour faire plaisir aux gens qui croient en moi. Grand club, petit club, je m’en fous : tout ce qui m’intéresse, c’est de jouer. Pour l’instant, le club veut que je reste. Moi, je veux jouer tous les matchs ! Parce qu’un joueur, par définition, c’est celui qui joue.

Propos recueillis par Pierre Prugneau