CSKA Moscou – OL (0-1) : Marcelo, le pion venu du froid

Marcelo

LES NOTES. On ne sait pas quel maillot cette grande faucheuse de Dostoeïevski aurait pu porter du côté des clubs moscovites. Sans doute pas celui du CSKA tant les Lyonnais ont semblé habités par l’esprit qui souffle dans son Joueur, celui des parieurs invétérés qui ont décidé de miser toute leur saison à la roulette les soirs d’Europa League. Une victoire 1-0 suffit à faire le bonheur de l’OL qui, à défaut de projet, s’en remet à quelques restes de talent pour provoquer sa chance. Et faire du « rien ne va plus » un titre parfait pour la suite de sa saison.

 

Huitième de finale aller de Ligue Europa, jeudi 8 mars 2018

CSKA Moscou – Olympique Lyonnais 0-1

But : Marcelo (68e)

Avertissements : Nababkin (30e) et Natcho (59e) au CSKA, Tousart (88e) et Cornet (90e+2) à l’OL

CSKA : Akinfeev (cap) – A. Berezutski, Ignashevich, Nababkin – Kuchaev, Dzagoev (Bistrovic, 82e), Natcho, Golovin, Milanov (Vitinho, 73e) – Wernbloom, Musa. Entr. :

OL : Lopes (cap) – Tete, Marcelo, Morel, Mendy – Ndombele, Tousart, Aouar – Traoré (Cornet, 76e), Mariano (Mendy, 90e), Memphis (Maolida, 85e). Entr. : Bruno Genesio.

Lopes 6 – Tete 4, Marcelo 6, Morel 4, Marçal 5 – Ndombele 7, Tousart 6, Aouar 6 – Traoré 4, Diaz 4, Memphis 5

 

On ne sait pas qui a lâché l’affaire le premier, entre l’OL et le jeu. Pour cette fois, on n’en voudra pas aux hommes de Genesio, tant le jeu n’avait rien à faire sur le terrain de la VEB Arena. En première mi-temps, les Lyonnais s’emploient à le prendre à leur compte en se contentant de réciter un 4-3-3 au classicisme achevé. Où Aouar à la mène fait tranquillement basculer son monde côté gauche, tentant de mobiliser de ce qu’il reste d’appuis du côté de Marçal et de Memphis.

 

Soviet supplice

Vingt premières minutes pendant lesquelles la possession reste lyonnaise. Reste à savoir quoi en faire. Et c’est là qu’on voit venir l’affaire de loin, en traumatisés des dimanches après-midis de Ligue 1. Le CSKA laisse les Lyonnais s’abîmer dans leur partie de five sur le permafrost, attendant tranquillement de lancer un contre façon crème et châtiment.

A la 15ème, c’est un dégagement de Lopes sur Dzagoev qui manque de torpiller le début de match lyonnais. Le milieu moscovite peut alors lancer Musa dans la surface. Au duel, c’est le gardien lyonnais qui parvient à se montrer le plus décisif, toutes paumes devant, sans laisser la moindre trace de tarte sur le visage de son adversaire. Le but est évité et l’honneur est sauf.

Dans cette mi-temps aux allures de soviet supplice, l’OL torpille les dernières illusions de jeu en investissant Marcelo et Morel en dépositaires de son animation. Surtout quand à l’arrivée, les lancements plus ou moins approximatifs atterrissent du côté de Traoré qui réussit ses contrôles comme d’autres gagnent au loto. Quand la chance est au rendez-vous, l’espoir de banco finit en crash intégral sur la défense moscovite (33ème).

 

Poussive riot

Après son ouverture à la Garande, Goncharenko aurait pu se contenter d’attendre la faille en seconde période. C’est mal connaître Bruno « Bobby Fischer » Genesio qui balance alors une réplique à la limite de la métaphysique. Plutôt que de continuer à déjouer, l’OL va cesser de jouer. Voilà l’idée : ne plus rien faire. Attendre. Un premier coup franc envoyé par Memphis (61ème) qui oblige Akinfeev à se détendre pour renvoyer au loin les Lyonnais. Avant que Marcelo ne vienne lui poster une missive décisive sur corner (67ème), à la faveur d’une sortie à l’aventure du gardien moscovite.

On n’a alors jamais aussi senti l’OL à son aise qu’à partir de ce moment où il a fallu étirer le match jusqu’au bout de l’ennui. Où il n’est plus question que d’envoyer les derniers entrants, Cornet et Maolida, se prendre les pieds dans leurs dribbles et conserver le précieux avantage, bien au chaud dans la défense du CSKA. Un genre de parodie de jeu qui convient parfaitement à l’OL, candidat revendiqué au grand soir et qui en est encore à mouiller son petit doigt pour savoir dans quel sens pourrait souffler le vent de la révolte. On connaissait les matchs de poussins. Force est de constater qu’il va falloir continuer à faire avec ceux des poussifs. Puisque jouer ensemble est un projet bien trop complexe à mener à ce moment-là de la saison, il faut s’en remettre aux quelques exploits qui ont évité que la campagne de Russie vire à la Bérézina.

 

Bon Bison de Russie

Avec son volume et ses traversées pleines lignes, Ndombele s’y est tenu sur l’ensemble des deux périodes. S’il a eu le plus grand mal à trouver en bout de chaîne Traoré en panne d’inspiration dès qu’il s’agit d’envoyer un appel, le bon Bison de Russie a pu davantage compter sur Tousart dans le soutien à la gratte et à la première relance. La répartition des tâches continue d’opérer, le premier se chargeant de redonner au jeu lyonnais la verticalité qui lui manque et au second d’assurer le maintien des lignes sur toute la largeur du terrain. C’est en partie au duo que la défense doit d’avoir tenu sans trop d’inquiétude pendant 90 minutes.

 

On ne naît pas gardien, on le construit

Et lorsqu’elle s’est retrouvée prise en défaut, sur les quelques tentatives de contres envoyées par la paire Musa-Wernbloom, elle a pu compter sur Lopes. Renvoyé à son rôle de capitaine fracasse depuis qu’on l’accuse d’arrêter à coups genoux les attaquants adverses, le Portugais de Givors a rappelé qu’il était surtout ce gardien de combat que Coupet avait repéré, bien avant de prendre la succession de Bats. Ce regain d’explosivité, parfois à la limite de l’agressivité, n’est pas sans rappeler qu’on ne naît pas gardien. On le construit. A ce titre, le duel remporté face à Musa (15ème), puis la détente décisive sur la déviation de la tête de Chalov (88ème) rappellent quel gardien Coupet a pu être, monstre de travail, tout à sa quête dans ce passage délicat de la puissance vers toujours plus de souplesse. Et l’on devine mieux quel gardien Lopes pourrait devenir dans les prochains mois.

 

Pas de lutte sans un minimum de classe

On aimerait avoir les mêmes certitudes quant à la poursuite d’un projet de jeu. L’OL n’en tient pas pour le moment. Reste que le fond est apparu moins indigent depuis deux matchs. Et le retour d’Aouar dans l’axe pour assurer la distribution n’y est sans doute pas pour rien. A l’heure où l’OL calque son projet sur celui des clubs sans idée, s’en remettant aux exploits individuels de plus en plus prévisibles pour des adversaires un minimum informés, le talent d’Aouar est peut-être de savoir redonner ce qu’il faut de sens au collectif. Comme ça que la passe se fait moins décisive, mais libère toujours davantage de place pour ceux à qui il revient de s’en charger. Si Diaz a eu le plus grand mal à être servi dans la surface, les rares fois où il a pu être trouvé, c’est à une passe d’Aouar qui ouvre le jeu pour Marçal ou pour Memphis qu’il le doit (73ème). Il suffit que le jeune milieu lyonnais revienne aux affaires pour que le jeu lyonnais retrouve un peu de souffle. Preuve que la lutte souvent invoquée par Genesio pour mobiliser ses troupes ne vaut rien sans un minimum de classe.

Serge Rezza

(Photo UEFA)

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